Zoé LUNEL

Ce rachat américain du Doliprane coûte 10 milliards à Sanofi : Bpifrance impose une présence minimale pour éviter le choc

avril 30, 2025

Sanofi, Opella et la souveraineté pharmaceutique : ce que change la vente à 10 milliards d’euros

Sanofi vient tout juste d’annoncer la finalisation de la vente de 50 % d’Opella, maison-mère du Doliprane, au fonds d’investissement américain CD&R. Une décision qui secoue le secteur pharmaceutique français ! Quelles conséquences immédiates pour l’économie ? Pourquoi une telle transaction maintenant ? Sanofi conserve-t-il la maîtrise du marché français du paracétamol ? Il y a de quoi s’inquiéter, même si d’aucuns s’en félicitent.

Les faits à retenir d’emblée

  • Transaction record de 10 milliards d’euros.

  • Sanofi ne détient plus que 48,2 % d’Opella, contre 50 % pour CD&R et 1,8 % pour Bpifrance.

  • Doliprane, médicament français le plus vendu, change (en partie) de pavillon américain.

  • Un dossier brûlant pour la souveraineté sanitaire et la continuité industrielle française.

Sanofi recentre sa stratégie sur l’innovation

Sanofi, jadis leader incontesté sur la santé grand public, a choisi de miser davantage sur les traitements innovants et la recherche pharmaceutique de rupture. Qui aurait cru au désengagement progressif d’une pépite comme Opella, alors que Doliprane s’arrache à 300 millions de boîtes par an ? Cependant, ce recentrage stratégique n’est pas nouveau chez les géants mondiaux du médicament, pressés d’innover dans les biotechnologies.

Souveraineté sanitaire : la crainte d’un séisme

La question de la souveraineté pharmaceutique, exacerbée par la crise Covid et les récentes tensions d’approvisionnement, s’impose : la France peut-elle encore assurer la production locale de ses médicaments essentiels ? Julie Van Ongevalle, PDG d’Opella, tempère :

« Nos usines de Compiègne et Lisieux continueront à fabriquer le Doliprane pour la France et l’Europe, nous restons un acteur majeur en France. »

Mais la prise de pouvoir d’un fonds étranger suscite logiquement des craintes, y compris du côté syndical : « Si demain CD&R décide de rationaliser la production, qui nous dit que la France restera prioritaire ? » s’interroge un représentant CGT.

Un équilibre précaire entre capital privé et présence d’État

L’entrée de Bpifrance (1,8 % du capital) dans l’actionnariat, négociée par le gouvernement pour apaiser la polémique politique, incarne la volonté de préserver, symboliquement du moins, un ancrage français dans Opella. Faut-il y voir la promesse d’une gouvernance partagée ? Rien n’est moins sûr, car le fonds américain détient désormais les clefs.

Quels risques et opportunités pour l’industrie et l’emploi ?

  • Risque : une délocalisation progressive de la production, au détriment des emplois tricolores.

  • Opportunité : un accès facilité à l’investissement international et à de nouveaux marchés, à condition que la France reste un socle industriel.

  • Incertitude : la politique sociale future d’Opella. Les salariés sont-ils rassurés ? « On nous répète qu’il n’y aura pas de plan social. Pourtant, personne n’ignore que les fonds d’investissement réfléchissent à l’échelle mondiale », confie un employé d’Opella sous anonymat.

Un virage symptomatique de la mondialisation du médicament

Est-ce la fin d’une époque ? De nombreux observateurs pointent le risque d’une dilution progressive de la souveraineté industrielle française, même si la dynamique mondiale exige souplesse et opportunisme. Comment concilier innovation, rentabilité, emploi local et indépendance sanitaire ? Un dilemme insolvable ? Ou au contraire, une chance inédite d’inventer une nouvelle gouvernance pharmaceutique franco-internationale ?

Ce qu’il faut retenir : Sanofi vend, mais ne quitte pas. Opella sort de l’orbite du géant français tout en y gardant une ancre. Le paracétamol restera produit en France pour l’instant. Gare toutefois à ce que la promesse de l’innovation ne se fasse pas au prix de l’indépendance. Restez attentifs : le vrai test viendra lors des prochains arbitrages industriels.